Manager en temps de crise : 5 clés pour agir au quotidien

11 novembre 2020 Non classé

De nombreux salariés s’inquiètent de leur avenir. La crise se durcit, ses impacts se concrétisent, une communication médiatique anxiogène alimente les peurs. Comment piloter son équipe dans un contexte aussi difficile et complexe ?

D’abord en se rappelant que la confiance ne se décrète pas : elle résulte en partie de la qualité de votre accompagnement managérial. Ensuite en travaillant les fondamentaux (= ensemble d’évidences que l’on oublie tous les jours) : la communication, les repères, les règles, l’implication, le courage managérial.

1- Je renforce la communication : j’écoute, je communique en positif, et j’informe régulièrement

Être à l’écoute, c’est se rendre disponible et attentif aux préoccupations des équipes. Vos collaborateurs ont besoin d’exprimer leurs inquiétudes, car verbaliser permet de partager et de relativiser. Ils n’attendent pas des solutions miracle, ni même d’être rassurés, mais une écoute attentive et sécurisante :  » mon manager m’a entendu, il me comprend « . Ce simple constat rassure.
Si vous ne l’organisez pas, cette expression se fera de manière incontrôlée par des canaux informels, avec des effets potentiellement néfastes. Créez des temps et des espaces d’échange, des  » sas  » destinés à évacuer les tensions. Une fois les émotions exprimées et entendues, il devient possible de se remobiliser dans l’action.

Passez fréquemment des messages positifs, ils renforcent la confiance et préservent  » l’estime de soi  » collective et individuelle : un client gagné, une action de progrès, un client partant qui a été rattrapé, la bonne ambiance dans l’équipe… tout n’est pas noir, et ces messages positifs (et sincères !) sont un des premiers facteurs de motivation.

Informez régulièrement votre équipe et soyez aussi transparent que possible : chiffres clé, tendance, visibilité. Dites ce que vous savez, ne masquez pas ce que vous ne savez pas.  » Nous n’avons à ce jour aucune visibilité sur le carnet de commande de juin  » : ce constat n’est pas un aveu de faiblesse, il démontre la lucidité du manager et sa capacité à assumer la situation.
A l’image de ce dirigeant d’une société de service, qui annonce très simplement qu’en l’état actuel, l’entreprise est viable jusqu’en septembre. Après avoir écouté les réactions, il explique ensuite les plans d’actions et insiste sur le rôle clé de chacun, et l’équipe repart remobilisée.

Dites quand vous ne pouvez pas dire :  » J’ai des informations mais je ne peux pas encore les partager  » : chacun peut comprendre une posture de prudence ou un devoir de réserve. Cette transparence alimente la confiance, plutôt que le sentiment de cacher quelque chose.

Informer, c’est respecter, responsabiliser et donner les moyens d’agir. Temporiser, minimiser, dissimuler, c’est infantiliser et laisser libre cours à l’interprétation. La transparence se transforme en confiance, l’opacité dégrade la performance et rend suspectes même les informations exactes.

2- Je redonne des repères

Et d’abord par votre présence  » terrain «  (même en distanciel !). En tant que manager, vous êtes le premier des repères et la notion de proximité prend ici tout son sens : être présent même à distance (en visio, par téléphone, par tchat, par mail), en présentiel passer dans les ateliers, dans les bureaux, visiter les sites éloignés, partager une pause café, être sur le terrain au quotidien, passer un coup de fil aux collaborateurs sur la route… des actes simples qui montrent à l’équipage que dans la tempête le capitaine est aussi sur le pont, avec eux.

Soyez intraitable sur les rituels d’animation (repères temporels), ces moments collectifs où vous rassemblez l’équipe : réguliers ou exceptionnels, en mode réunion classique ou  » flash  » (15 mn debout dans un bureau, 5mn au pied d’une ligne de production), ils sont essentiels pour préserver l’esprit d’équipe, transmettre les messages clé et prendre la température. C’est leur régularité qui donne le tempo.

3-  Je suis ferme et précis sur les règles et les comportements attendus

 » Dans cette situation exceptionnelle, je vous demande tout particulièrement de… « . Votre équipe a besoin de structure et de repères très clairs. Combativité, solidarité, créativité sont des valeurs clés qui ne se décrètent pas mais se cultivent dans l’action : soyez précis et concret sur ce que vous attendez de vos équipes (par exemple une attention particulière à l’accueil des clients, une réponse sous 24h à tous les messages, une vigilance sur le recouvrement, une facturation rapide des prestations réalisées, des idées d’amélioration de la qualité de service…).
Élaborez avec eux des règles de fonctionnement et de comportements positives, qui favorisent la performance et le bien-être.
Recadrez très vite le moindre écart, cela alimentera le sentiment d’équité et de sécurité de votre équipe.

4- Je maintiens mon équipe dans l’action

Focalisez les énergies sur des objectifs concrets et court terme pour ne pas laisser de place aux doutes et à la gamberge : 15 appels prospects par jour, 98% de commandes passées dans les temps cette semaine, l’atelier réorganisé dans deux semaines, les bureaux rangés pour demain, une enquête de satisfaction auprès de nos clients internes pour la fin du mois…

Repérez et éliminez les questions toxiques :  » est-ce qu’on va s’en sortir ? ça nous emmène où tout ça ? et mon job demain ? « . Ces questions tournent en boucle, pompent de l’énergie, dégradent l’engagement et la motivation, et n’ont pas de réponse certaine. La seule réponse valide et lucide, c’est :  » ici et maintenant, il n’y a pas de réponse « . C’est par l’action que vous allez construire votre avenir, en vous focalisant sur ce qui dépend de vous.

Appuyez-vous sur l’intelligence collective pour stimuler la créativité :  » Ok, la situation est tendue, que pouvons-nous faire pour apporter encore plus de service à nos clients ? Comment contribuer davantage à leur maîtrise des coûts ? « . Impliquez vos équipes, aidez-les à se projeter pour entretenir une dynamique. Même s’il y a du brouillard : vers où allons-nous et quel chemin allons-nous tester ?

5- Je cultive mon courage managérial

Manager c’est décider, et en situation de crise le temps est compté. Soyez transparent sur vos critères de décision afin de ne pas donner à l’équipe un sentiment d’arbitraire. Évaluez l’impact pour vos clients, pour l’entreprise, pour l’équipe, et pour les équipiers. Communiquez sans chercher à minimiser l’impact du message : les équipes détectent très vite une mauvaise nouvelle  » enrobée « . Soyez direct, factuel, précis, puis très à l’écoute des réactions, de manière canaliser les émotions parfois très fortes. Eclairée par des critères connus de tous, étayée par des faits, votre décision sera finalement perçue comme légitime.

Manager en temps de crise, c’est se souvenir que la qualité de la relation managériale est l’une des clés de la performance, et redonner tout son sens à l’art si complexe du management. Tirer parti des épreuves pour grandir, agir et non pas subir. Et, dès aujourd’hui, renforcer la performance des équipes pour préparer demain.

Armel Cusin-Gogat & l’équipe BF