manager en mode “ COVID 19 “ : #1 comment surfer la vague émotionnelle avec vos équipes ?
Qu’elles soient visibles ou très discrètes, du type lames de fond ou déferlantes, beaucoup d’entre nous sommes traversés par de fortes « vagues émotionnelles ».
Je vous invite pour le « plaisir et le frisson » à visionner ce surfer sur une vague de près de 30m : tout y est, concentration, instant présent, adaptation / apprentissage permanent, focus sur l’action… pour rester avec et sur la vague, aller plus loin grâce à elle, sans tomber ni nous laisser engloutir, et réussir avec et malgré la peur.
Concrètement, en tant que manager, comment puis-je accompagner mes équipes dans de telles vagues ?
Nous vous proposons dans cet article quelques clés de lecture et d’action.
Un choc émotionnel d’une grande brutalité
La plupart d’entre nous vivons un véritable choc : l’annonce de l’arrivée de la pandémie, la montée de l’inquiétude, les mesures de confinement qui confirment l’ampleur du danger individuel et collectif, les témoignages des acteurs politiques et des soignants inquiets face à la vague qui grandit, nos certitudes qui s’effritent (dans notre capacité de contrôle, dans la solidité de nos sociétés…).
De quoi susciter, réveiller et amplifier des peurs et des angoisses très profondes : d’une part pour notre santé et celle de nos proches, d’autre part pour notre sécurité matérielle (peur de perdre notre revenu, de ne plus pouvoir faire face à nos charges financières, de ne plus pouvoir subvenir aux besoins de nos familles…).
S’ajoute à cela l’expérience du confinement, qui nous coupe plus ou moins totalement de notre cercle familial, amical, et professionnel : pour certains d’entre nous, plus de mails, plus d’appels… bref un arrêt soudain et brutal des interactions.
Ou pour d’autres la nécessité de devoir rester à leur poste, dans l’entreprise, avec les risques sanitaires que cela comporte pour soi, ses collègues, et ses proches.
Un véritable processus de deuil
Nous vivons donc un processus de deuil qui passe par quelques étapes initiales incompressibles : le choc, le déni (“ce n’est pas possible“, “moi je continue à faire la bise si je veux“), la colère (“comment se fait-il que ce n’ait pas été suffisamment anticipé“, “ et pourquoi nous on est à l’usine alors que les autres sont planqués chez eux“), le marchandage (“ce n’est pas si grave, ça ne va pas durer si longtemps“, “ils exagèrent“), la peur…
Il est donc possible et normal que vous comme vos équipes soyez dans des états émotionnels intenses, qui peuvent osciller entre des moments de grande confiance et des moments de grande détresse.
Une absence de repères
S’agissant d’une situation totalement inédite, nos expériences passées ne nous fournissent pratiquement aucun repère sur les comportements adéquats et les issues possibles. Nous sommes donc en mode « découverte au jour le jour », à la fois de nos propres réactions et de celles des autres, et dans une situation d’apprentissage individuel et collectif dans de multiples dimensions (ne serait-ce que de déprogrammer nos conventions sociales pour appliquer les gestes-barrières, pour certains apprendre à vivre en famille 24/24h, apprendre la technique de télétravail, produire en « mode dégradé » sur les sites… ). Ce mode “d’apprentissage total“ consomme beaucoup d’énergie, et génère du stress.
Accueillir et canaliser les émotions
Dans une telle situation, les émotions trop fortes peuvent faire obstacle à notre capacité d’action. Très souvent, les acteurs en entreprise se sentent démunis face à cela, incapables de réagir : « si je commence à en parler, ça va être l’avalanche de plaintes, de mal-être… or concrètement je n’y peux rien… ». Or la bonne nouvelle, c’est que vous pouvez agir, et accompagner vos équipes pour les canaliser efficacement.
Le moins aidant serait probablement la stratégie d’évitement qui consiste à ignorer totalement cette composante émotionnelle, de faire comme si de rien n’était, et d’essayer de concentrer vos équipiers sur leurs tâches opérationnelles. Nul doute que l’émotion va ressurgir tôt ou tard sous forme de tensions puis de conflits.
Il s’agit d’éviter le déni, sans pour autant dramatiser. C’est pourquoi il est si important d’accueillir ces émotions, et de permettre à chacun de les exprimer.
Concrètement, comment faire ?
Voici 3 pistes d’action, valables en management à distance comme en présentiel.
1- « Affrontez » les émotions plutôt que de les éviter : relevez très régulièrement la météo émotionnelle de vos équipiers (et la vôtre !) soit dans des temps individuel soit en collectif (météo du moment en réunion d’équipe) – en cas de météo très mauvaise vous pouvez très simplement questionner « de quoi as-tu besoin, comment pouvons-nous t’aider ? ». Vous ferez l’expérience que c’est déjà très apaisant de se sentir autorisé à parler de ses émotions difficiles, de ne pas en faire un tabou. Au moindre signe, allez au contact pour vérifier l’état de la personne.
2- Paradoxalement, ne cherchez pas à rassurer : vous risqueriez de donner de faux espoirs, du coup de dégrader la confiance que vos équipiers vous portent, et de leur donner le sentiment que vous ne les écoutez pas.
Au contraire, la plupart d’entre nous n’avons que de « bonnes raisons » d’être inquiets, et mieux vaut accuser réception de cet état de fait que se bercer d’illusions. Posez les inquiétudes, et ensuite seulement « ok, maintenant que nous avons posé tout cela, concrètement, comment pouvons-nous avancer » ?
3- Éliminez les questions toxiques : les angoisses, les incertitudes se traduisent parfois par des ruminations sur des questions qui « tournent en boucle » (exemple : est-ce que je vais perdre mon job, est-ce que la boîte va s’en sortir, et si… et si…)
Faites avec vos équipes la liste de toutes les questions qui vous préoccupent puis focalisez-vous sur l’action :
- chacun réfléchit 5 mn en silence, et écrit toutes ses questions
- chacun partage en 2 mn, personne ne réagit (une personne note toutes les questions, au paper en présentiel, sur un doc en écran partagé si vous êtes à distance)
- ensuite vous relisez ensemble toutes les questions, et complétez si d’autres émergent
- puis vous les classez ensemble en 2 groupes :
- les questions auxquelles personne ne sait répondre (combien de temps ça va durer ? l’entreprise va-t-elle survivre ? et nos clients ?)
- les questions auxquelles il est possible de répondre, avec deux sous-groupes :
- 2.1 celles auxquelles il est important de répondre maintenant
- 2.2 et les autres (nous pourrions répondre, mais ça ne nous apporterait rien)
- les questions du groupe 1 sont les questions « toxiques » : elles n’ont pas de réponse, elles polluent les têtes et augmentent l’anxiété. Donc n’y perdez pas d’énergie, d’autant que les réponses vont émerger au fur et à mesure en agissant, pas en ruminant dans nos têtes. Incitez donc l’équipe à se concentrer sur l’action :
- « ici et maintenant, que devons-nous faire très concrètement pour préserver l’entreprise et donc nos jobs »
- « quelles sont, dans notre quotidien, les plus petites actions que nous pouvons faire pour continuer à traverser ? »
Une question sur la mise en pratique ? Contactez-nous, tout simplement…
Nous vous souhaitons plein d’énergie pour tirer le meilleur de cette période inédite.
Armel, pour l’équipe BF
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